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17 juin 2013 1 17 /06 /juin /2013 13:17

L'introduction au livre de Jérémie (Jr 1,1-3) est un ajout postérieur et qui a pour but de préciser la période de prédication du prophète lors de l'édition du livre. L'appel de Jérémie proprement dit commence au verset 4 avec une formule qui se répète aux versets 11 et 13 : « la parole du Seigneur me parvint ». La première expérience du prophète, c'est l'écoute de la parole de Dieu, contrairement à Esaïe (Es 6) ou Ezekiel (Ez 1 à 3) pour qui la première expérience est celle de la vision de la gloire de Dieu.

Dieu dit à Jérémie au verset 7 « tu diras tout ce que je t’ordonnerai » et au verset 9 « J’ai mis mes paroles dans ta bouche » ce qui rappelle Deutéronome 18,18 où Dieu dit à Moïse : « Je susciterai pour eux, parmi leurs frères, un prophète comme toi ; je mettrai mes paroles dans sa bouche, et il leur dira tout ce que je lui ordonnerai ». Il est possible que ce soit un rédacteur qui ai rédigé en partie ce texte car il paraît invraisemblable que Jérémie ai pu se comparer ainsi à Moïse. C'est dire l'estime qu'avaient les disciples de Jérémie pour leur maître. Dieu prend la parole et exprime à la fois son affection pour Jérémie mais aussi le destin auquel il a pensé avant même sa naissance : Jérémie sera un nouveau Moïse, un prophète, mais avec cette particularité d'être prophète « pour les nations (goyim) ». Qu'est-ce que Dieu veut dire à travers cela? Pour le comprendre il faut chercher le sens du mot « goï » dans le livre de Jérémie. On l'a vu dans les articles précédents, Jérémie parle à Juda et Israël (même si le royaume du Nord a disparu), mais aussi à Babylone, aux assyriens, aux égyptiens, aux moabites... Toutes entrent (souvent malgré elles) dans le plan de Dieu pour la conversion du monde.

Le Seigneur explique donc à Jérémie qu'il doit être prophète pour les nations et Jérémie comprend immédiatement de quoi il s'agit. Et encore à l'exemple de Moïse (Exode 3,1 à 4,17), il tente de se défendre, ou plutôt de se défiler en invoquant, non pas son âge comme certaines traductions le font penser, mais plutôt sa position sociale : je ne sais pas parler car je suis un « na'ar », c'est à dire un jeune homme. Ce terme est parfois traduit par « enfant », mais si dans certains contextes c'est possible (Exode 2,6) ici il s'agit plutôt d'un garçon de 17 à 30 ans, capable de combattre (Genèse 37,2 ou 2Samuel, 18,5) mais qui ne peut pas prétendre être un ancien. Or, ce sont les anciens qui peuvent prendre la parole dans l'assemblée...

Or, pour Dieu, ce qui fait le destin de Jérémie, ce n'est pas son statut social ou religieux, mais la promesse : « je suis avec toi ». C'est la même promesse qui avait été faite à Isaac (Genèse 26,24) et à Jacob (Genèse 28,15). Cette promesse est la même que celle qui nous est faite en tant que chrétien (Matthieu 8,18-20). Jérémie doit s'abandonner à faire confiance : Dieu le protégera si Jérémie fait ce pour quoi il est fait. Et s'il est un prophète, son outil est la Parole de Dieu. Avec cet outil il va pouvoir déraciner, démolir, faire disparaître, raser une mauvaise vision de Dieu dans le cœur du peuple puis bâtir et planter une nouvelle vision (Jr 31,33-34) : Moïse fut le premier prophète d'Israël, Jérémie sera le dernier de cette ère pendant laquelle l'infidélité a prédominé (Jr 11,6-8).

Questions pour méditer :
- A quel homme ou femme de la bible vous compareriez-vous ? Demandez aux autres personnes de votre assemblée.
- A quoi pensez-vous que Dieu vous appelle ? Quelle est, ou quelles sont, les missions que Dieu voudrait vous confier ? Etes-vous en train de les accomplir ou attendez-vous de vous en sentir « capables » ?
- Quelles sont les similitudes entre la mission de Jérémie et la vôtre ?

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4 mars 2013 1 04 /03 /mars /2013 06:12

Jérémie 32 est un texte composite, mais dont le sens final doit défier notre façon d'envisager la foi. Ce texte met en scène Jérémie pendant le siège de Jérusalem par Nabuchodonosor. Alors que tout tend à montrer qu'on approche de la fin des capacités de résistance de la ville, et que la situation est catastrophique, Jérémie... fait une transaction. Au lieu de se préparer à fuir, au lieu de tenter de sauver ce qui peut encore l'être, Jérémie achète un champ à son oncle, à Anatoth sa ville natale. Il prend des témoins, il écrit un contrat et le fait mettre en jarre pour le protéger longtemps.

Quelle est donc la signification de ce geste, normal en temps de paix, mais incongru en temps de siège ? Alors que les troupes babyloniennes sont en train de ravager le pays, à quoi sert-il d'acquérir un titre de propriété qui a toutes les chances de ne plus avoir aucune valeur quelques semaines plus tard ? N'est-ce pas jeter l'argent par les fenêtres ?

Il s'agit de la folie de la foi. Car c'est Dieu qui a dit à Jérémie d'acheter ce champs. Et sa confiance en Dieu et en ses promesses est telle, qu'il croit dur comme fer qu'un jour, « on achètera encore des maisons, des champs et des vignes dans ce pays » (Jérémie 32,15). Ce texte est pertinemment placé après les promesses du chapitre précédent en 31,27-28. Mais la foi de Jérémie n'est pas aveugle. Le prophète, qui a une vraie relation avec Dieu, adresse une prière qui se termine par une exclamation interrogative : « pressée par l’épée, la famine et la peste, [la ville] ne peut (...) que se rendre aux forces chaldéennes qui l’assaillent. Ce que tu as décrété arrive, et toi, tu ne fais que regarder. Et c’est toi qui me dis, Seigneur DIEU : Achète le champ en pesant l’argent et en convoquant des témoins ! alors que la ville ne peut que se rendre aux forces chaldéennes » (32,24-25 TOB).

Mais Dieu corrige Jérémie (32,36) : la ville n'est pas « livrée au roi de Babylone, vaincue par l’épée, par la famine et par la peste » ; cela, ce sont Jérémie et les Israélites qui le disent. Mais ce n'est que l'apparence de la réalité spirituelle, car le vrai pouvoir est celui de Dieu : Jérusalem est corrigée afin qu'elle change de mentalité (32,39 TOB), de cœur (NBS, JER, S21), d'orientation (TOB), de chemin (S21), de voie (NBS) de conduite (SER). Dieu veut qu'on mette tout notre cœur à le chercher (29,13), mais il met lui aussi tout son cœur à aimer son peuple (32,41). Autant les difficultés sont grandes, autant le repos sera appréciable (32,42). Quand tout semble aller mal, c'est que Dieu travaille à réparer ce que les hommes ont cassé, et il y a toujours un espoir de restauration.

Finalement, un jour arrivera où à nouveau « on achètera des champs dans ce pays » (32,44).

 

Questions pour méditer :

- Qu'achèterai-je si un ennemi était en train d'arriver pour tout détruire dans mon pays ?
- Quand un problème survient, est-ce que j'ose demander à Dieu pourquoi ? La réponse me fait-elle peur ?
- La destruction est-elle le but de la colère de Dieu ? Si non, est-ce que je mesure la différence entre la colère de l'homme et celle de Dieu ?

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25 février 2013 1 25 /02 /février /2013 05:59

En Jérémie 31,2 une allusion au désert rapprochait l'exode et l'exil. Ce rapprochement est encore plus marqué par la prophétie de la nouvelle alliance en 31,31-34. Pour autant il n'y a pas identité entre les deux alliances, l'une est qualifiée de nouvelle, abrogeant la précédente (Hébreux 8,13). Un pas va être franchi dans la relation entre Dieu et les hommes.

 

Le texte définitif tel que nous pouvons le lire, est le résultat du façonnage de l'Esprit Saint à travers l'oeuvre du prophète, de ses disciples, des scribes et autres éditeurs (ceux qui ont collecté et regroupé les oracles). Dans ce texte, deux promesses se suivent : l'une concerne un avenir relativement proche (31,27-30) l'autre un avenir plus lointain. En effet l'expression « des jours viennent » (note 1) se retrouve au début des deux passages mais semble ne pas se rapporter aux mêmes évènements. A l'origine il s'agit de deux oracles mis l'un à côté de l'autre mais probablement pas prononcés au même moment.

 

Dans le premier passage, le Seigneur promet de ré-ensemencer les terres d'Israël et de Juda de semences humaines et animales, et de terminer le processus dont parle Jérémie 1,10. La référence est clairement historique. Elle concerne la fin de l'exil. Mais ce texte amène une modification importante par rapport à la manière de vivre l'alliance : contrairement à ce qui se passait auparavant, chaque membre de la communauté sera responsable de son propre comportement et Dieu veillera à ce que la culpabilité d'une génération ne rejaillisse pas sur celles d'après (cf Deutéronome 5,9 et parallèles). On a ici un écho à la prédication d'Ezekiel, prophète de la même époque que Jérémie, mais habitant parmi les déportés en Babylonie (cf Ezekiel 18).

 

Dans le deuxième passage, la référence n'est pas historique, mais spirituelle et relationnelle. L'alliance en question est « nouvelle » et « différente de l'alliance conclue » après la sortie d'Egypte. Il y a une rupture entre la loi inscrite sur des tables au Sinaï, et celle, à venir, qui sera inscrite dans le cœur de chaque individu constituant le peuple. Cette rupture ne consiste pas en un changement de la volonté de Dieu (chez lequel il n'y a pas de changement – Jacques 1,17), mais plutôt en l'homme : cela nécessite que chaque personne soit responsable. C'est ainsi que la mise en place de cette alliance présuppose d'abord la mise en œuvre de ce que promet Dieu aux versets 27 à 30. Dieu travaille progressivement et patiemment à l'élaboration de ses desseins.

 

Selon la première épître de Jean (2,20-21.27 - cf note 2), ce changement en l'homme est une onction : celle de l'Esprit (1Jean 3,24) ce qui rejoint ce que dit Ezekiel 36,27-28. Cette présence de l'Esprit, ou, ce qui en pratique revient au même, de la Parole de Dieu en nous, est le gage d'une relation personnelle du croyant avec Dieu. Cette relation n'aura plus besoin d'intermédiaire, plus besoin de prêtres ni de sacrifices, d'autant que cette nouvelle alliance comporte en elle-même le pardon des péchés (Jérémie 31,34b repris par Hébreux 8,8-12). Quelle promesse !

 

Alors, à quand cette nouvelle Alliance ? Jésus explique qu'elle sera établie à la croix et que nous devrons nous en souvenir à chaque moment d'eucharistie (Luc 22,20 et 1Corinthiens 11,25).

 

Questions pour méditer :

- Est-ce que je perçois comment a travaillé l'Esprit Saint pour nous transmettre la Bible ?
- Est-ce que je compte sur quelqu'un d'autre pour avoir une relation avec Dieu à ma place ? Est-ce que je me sens engagé envers Dieu ?
- Est-ce que je vis ma relation avec Dieu comme une liste de choses à respecter ? ou est-ce que je me laisse conduire par ma conscience de ce qu'est la volonté de Dieu ?
- A quel événement décisif Jésus lie-t-il la mise en œuvre par Dieu de cette nouvelle alliance dont parle Jérémie ?
- Est-ce que je comprends mieux ce qu'est le repas du Seigneur ?

 


Notes

 

1 Litt. : "Voici des jours, ceux qui viennent"
2 La première épître de Jean fait clairement référence à Jérémie en utilisant le même verbe « connaître » que dans la version grecque (appelée Septante) de Jérémie.
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